L’artificialisation en direct – Alain Josseau

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Spécialiste de l’art de la guerre, Alain Josseau utilise cette thématique pour dénoncer la manipulation des images et l’information de masse. En résidence au Quai des Savoirs, l’artiste s’est entouré d’un ingénieur et d’un scientifique du LAAS-CNRS de Toulouse pour fabriquer une créature robotisée prenant place dans un vrai-faux journal télévisé.


Breaking News, résultat de cette résidence, a été présentée durant Lumières sur le Quai 2022

Alain Josseau

Né en 1968, Alain Josseau s’est formé aux Beaux-Arts de Nantes avant d’obtenir un diplôme dans les nouvelles technologies de la création à Toulouse. Dessins, peintures, installations et vidéos sont autant de médiums que l’artiste utilise pour mettre à l’image l’épreuve du réel dans le contexte des guerres contemporaines. Aujourd’hui maître de conférence associé au département Arts Plastiques et Design de l’Université Toulouse 2 Jean Jaurès, Alain Josseau transmet sa passion pour les nouvelles technologies et continue d’exposer ses œuvres en France et à l’étranger.

Résidence au Quai des Savoirs en mai 2022

L’objet de la résidence d’Alain Josseau au Quai des Savoirs prend le nom d’Automatic War_PH2 (phase 2) en référence à son installation beaucoup plus grande, Automatic War TV réalisée en 2018 et produite par Chroniques-Biennale des Imaginaires Numériques. Cette dernière, présentée à la Biennale Némo au 104 à Paris en 2020, plante le décor d’un journal télévisé des plus réalistes où l’humanité a entièrement disparu mais où les machines telles que les drones continuent de se faire la guerre.

Au centre de l’écran, la journaliste d’apparence humaine n’est en réalité qu’un avatar au service d’une intelligence sans corps. Dans la phase 2 de l’œuvre, Alain Josseau choisit de remplacer l’avatar par une journaliste robotisée animée en temps réel dans le but d’amplifier la dimension artificielle et fictionnelle de l’installation.

Pour l’aider dans la conception de cette animatronique, en commençant par sa tête, Alain Josseau s’est entouré pendant ces deux semaines de résidence de l’expertise technique de Guilhem de Gramont, ingénieur-constructeur, et de celle de Guilhem Saurel, ingénieur de recherche au LAAS-CNRS de Toulouse pour la partie informatique. Tout l’enjeu de cette union des savoirs artistiques, techniques et scientifiques était la programmation informatique des mouvements de l’ensemble du visage : les yeux, la bouche et les lèvres. Le tout synchronisé sur la voix.

À propos des chercheurs

Guilhem de Gramont est ingénieur-constructeur, chef machiniste français.
Guilhem Saurel est ingénieur de recherche au LAAS-CNRS dans le département robotique au sein de l’équipe Gepetto dont le travail est centré sur l’analyse et la génération de mouvement des systèmes anthropomorphes.

Dans chacune des étapes de recherche, d’expérimentation et de réalisation, chacun d’entre eux apporte sa touche et les savoirs s’articulent. Alain Josseau s’attelle à la composition du visage en latex silicone, Guilhem de Gramont à la motorisation de la tête et enfin Guilhem Saurel à la programmation. Aucune des parties du projet n’auraient pu voir le jour sans les deux autres.

Le fruit de ce travail a été présenté en octobre 2022 durant le festival Lumières sur le Quai. La mise en scène finale s’intitulant Breaking News regroupe deux éléments phares, l’animatronique définitive et la maquette d’une ville en ruine présentée au Pavillon Blanc lors de l’exposition Images Flottantes. Les deux parties sont filmées en direct et agrégées avec des images de guerre récupérées sur Google Images en temps réel. Pour augmenter la crédibilité de ce vrai-faux journal TV, l’artiste a ajouté les codes des chaînes d’informations en continu avec leur célèbre bandeaux de titres sensationnels.

Cette installation interroge directement notre rapport aux médias et aux processus d’information et de désinformation à l’ère des nouvelles technologies. Alain Josseau démontre que l’on peut produire des « fake news » avec très peu de matériels suscitant notre esprit critique. Ce travail artistico-scientifique met en lumière l’automatisation de l’information, de plus en plus présente avec le développement de l’intelligence artificielle.


Crédit photos : © Emmanuel Grimault

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